vendredi 22 mai 2015

L'Hebdo du vendredi, article publié le 3 avril 2015
Du design au théâtre, il n’y a qu’un pas...de géant !
Avant d’être directeur artistique de La Boîte Noire, la compagnie de théâtre d’objets et de marionnettes qu’il a créée il y a bientôt 25 ans, André Parisot était designer. Rencontre avec un passionné de l’image qui présente le spectacle « Les derniers géants » dans le cadre du festival Méli-Môme qui se déroule jusqu’au 8 avril.

En 1989, André Parisot a quitté son poste de designer pour créer la compagnie de théâtre d'objets et de marionnettes La Boîte Noire.

En 1989, André Parisot a quitté son poste de designer pour créer la compagnie de théâtre d'objets et de marionnettes La Boîte Noire. (© l'Hebdo du Vendredi)
Tout quitter du jour au lendemain pour vivre sa passion. C’est ce qu’a fait André Parisot à la fin des années 80. Designer chez Electrolux, il envoie valser les gazinières, réfrigérateurs et autres appareils électroménagers pour se consacrer à une mécanique plus subtile et expressive : celle des marionnettes. « Je ne me sentais plus à l’aise avec le métier et surtout avec le marketing. J’ai eu envie de rencontrer le spectateur avec de vraies raisons, de vrais actes pour partager ma vision du monde, sans aucune prétention », explique celui qui est aujourd’hui directeur artistique de la Cie La Boîte Noire. Un rêve éveillé. « On peut avoir la tête dans les nuages, mais on reste aussi les pieds dans la réalité. Une compagnie, c’est aussi une entreprise ».

Une vingtaine de spectacles à son actif

Lorsqu’il décide de créer sa propre compagnie de théâtre d’objets et de marionnettes, ce n’est pas un hasard puisqu’il pratique déjà le théâtre amateur depuis de nombreuses années, en parallèle de son activité de designer. « Ça a peut-être à voir avec mon métier précédent, par rapport à l’histoire que peut raconter un objet. Quand je conçois un spectacle, ça commence toujours par des images ». Tout débute donc avec des croquis, un storyboard puis c’est la marionnette qui prend vie dans la tête d’André Parisot avant d’être fabriquée à la main par cet artiste-artisan du spectacle. Elles sont généralement en bois ou en pâte à papier, avec un corps articulé grâce à des ficelles ou du cuir. D’ailleurs, sa maison est remplie de personnages et d’objets prêts à s’animer pour nous raconter leur histoire, comme autant de souvenirs de spectacles passés ou à venir. « Il y a une force qui émane d’une marionnette lorsqu’elle est bien manipulée. Il y a une vraie présence qui tient presque de l’envoûtement ».
Aujourd’hui, la compagnie a une vingtaine de spectacles à son actif qui tournent dans la région, en France mais aussi pour quelques-uns à l’étranger : Québec, Maroc, Tunisie, Slovaquie. Certains sont adaptés de textes de Georges Perec, d’Oskar Panizza ou de l’opéra de Bizet tandis que d’autres sont de véritables créations. Mais ce qu’André préfère par dessus tout, ce sont les spectacles sans paroles. « Le visuel, c’est quelque chose qui me poursuit ». Dans une région qui abrite l’institut international de la Marionnette, on sait que cette discipline ne se cantonne pas à la jeunesse. Mais s’il avait quelques réticences au début, travailler pour le public de la petite enfance s’est finalement avéré très enrichissant. « C’est une ambiance très particulière, ça passe par le regard. Ce qui est drôle, ce sont les séances tous publics où les parents viennent avec leurs petits sur les genoux. Il y a des échanges qui se créent».

Un cabinet de curiosités sur les géants

Alors forcément, la Boîte Noire fait régulièrement partie de la programmation du festival Méli’Môme. Pour sa treizième participation, la compagnie présentera cette année un spectacle construit comme un cabinet de curiosité, Les derniers géants, créé avec la MJC intercommunale d’Aÿ, celle-là même qui a vu naître la compagnie. Le livre de François Place raconte l’histoire d’Archibald Léopold Ruthmore, un riche savant qui achète une dent de géant qui va le conduire jusqu’au pays des géants. A son retour, il rencontre le succès et rédige des ouvrages encyclopédiques, des dictionnaires linguistiques, participe à des conférences... Mais lors d’une deuxième expédition, il découvre que de faux explorateurs ont pillé l’endroit et détruit cette civilisation. En proie à la culpabilité, Archibald Léopold Ruthmore abandonne ses biens et décide de devenir matelot. Il y a deux ans, André a eu envie de monter cette histoire, mais sans jamais montrer les géants. « J’ai voulu travailler sur le récit sans être dans un rapport théâtral ». D’où le choix de cette forme artistique qui se présente comme un récit de voyage où le spectateur est invité à se promener dans le cabinet de curiosités d’Archibald Léopold Ruthmore. Neuf objets sont présentés : la dent de géant, un iconoscope qui nous entraîne sur le fleuve noir, dans la jungle, un traducteur neumatique qui décrypte le langage des géants, un dermovisiographe, un rocher, un oscillogramme à pendularité verticale et positionnement abatiquo-cinétique... Pour comprendre tous ces objets, deux guides animent l’exposition. André y interprète André Robinson, petit-fils de la gouvernante d’Archibald.
Festival Méli'Môme jusqu'au 8 avril.
    
Repères
André Parisot naît en 1953 dans la petite ville de Neufchâteau, dans les Vosges. En 1971, il commence des études artistiques aux Beaux-arts de Reims. Après un an de service militaire, il intègre, en 1977, l’entreprise Electrolux en tant que designer. Il est chargé de la conception esthétique des appareils électroménagers. Il y travaillera pendant quinze ans mais la prépondérance du marketing le poussera finalement à démissionner pour embrasser une toute autre carrière dans le milieu artistique. Il crée alors la compagnie de théâtre d’objets et de marionnettes La Boîte Noire, en 1989. Les spectacles vont s’enchaîner sous sa direction artistique : Le capitaine Pic ou le triomphe du règlement (1990), Quel petit vélo à guidon chromé au fond de la cour ? (1991), L’œil de la baleine (1991), Espèces d’espaces (1992)... Jusqu’à aujourd’hui avec Les derniers géants (2013), présenté dans le cadre du festival Méli’Môme. Le prochain spectacle ? Une petite forme autour du Guignol de Jacques Prévert.

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